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Le martyre de Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus

Le 1er octobre, l’Eglise Catholique fête Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, religieuse carmélite, née le 2 janvier 1873 à Alençon et morte le 30 septembre 1897 à Lisieux. Elle est vierge, patronne des missions, patronne secondaire de la France et docteur de l’Eglise.

Lorsqu’on parle de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, on pense spontanément à sa doctrine de l’amour et de l’abandon confiant, doctrine encore appelée la « petite voie de l’enfance spirituelle ». Mais il y a un autre aspect de sa spiritualité dont on parle peu. Ses consœurs l’appelaient en effet « notre pauvre petite martyre ».[1] Voyons de plus près d’où lui vient cette appellation.

Thérèse de Lisieux désirait le martyre depuis son enfance. Dans ses manuscrits autobiographiques, elle écrit : « Le Martyre, voilà le rêve de ma jeunesse, ce rêve, il a grandi avec moi sous les cloîtres du Carmel… Mais là encore je sens que mon rêve est une folie, car je ne saurais me borner à désirer un genre de martyre… Pour me satisfaire il me les faudrait tous… Comme toi mon Epoux Adoré, je voudrais être flagellée et crucifiée… Je voudrais mourir dépouillée comme St Barthélémy… Comme St jean, je voudrais être plongée dans l’huile bouillante, je voudrais subir tous les supplices infligés aux martyrs… Avec Se Agnès et Se Cécile je voudrais présenter mon cou au glaive et comme Jeanne d’Arc ma sœur chérie, je voudrais sur le bûcher murmurer ton Nom, ô Jésus… »[2]

Dans son billet de profession en date du 8 septembre 1890, elle renouvelle son désir : « Jésus, que pour toi je meure martyre, le martyre du cœur ou du corps, ou plutôt tous les deux… »[3]

 Le 9 juin 1895, elle s’offre comme Victime d’Holocauste à l’Amour Miséricordieux et écrit : « Afin de vivre dans un acte de parfait amour, je m’offre comme victime d’holocauste à votre Amour miséricordieux, vous suppliant de me consumer sans cesse, laissant déborder en mon âme les flots de tendresse infinie qui sont renfermés en vous et qu’ainsi je devienne Martyre de votre Amour, ô mon Dieu !... Que ce martyre après m’avoir préparée à paraître devant vous me fasse enfin mourir et que mon âme s’élance sans retard dans l’éternel embrassement de Votre Miséricordieux Amour… »[4]

Jésus exauça la prière de Thérèse. En plus de la mort à soi qui constituait sa vie ordinaire, Thérèse souffrait pendant ses oraisons de ce qu’elle appelait le martyre des désirs,[5] désirs extrêmement violents en comparaison desquels la mort elle-même serait un moindre mal. A l’approche des confessions sacramentelles, elle était en proie au martyre des scrupules. « Il faut, disait-elle, avoir passé par ce martyre pour le bien comprendre »[6]. Mais le véritable martyre, sous les deux formes de martyre du cœur et du corps, allait commencer en 1897 quand début avril Thérèse tombe gravement malade. Atteinte de tuberculose pulmonaire chronique, elle étouffe, tousse douloureusement et crache du sang.

En plus des souffrances physiques, elle doit encore lutter pour garder la foi et l’espérance, concrètement, croire qu’il y a une vie éternelle et que le ciel existe vraiment.[7] « Si vous saviez, … dit-elle, quelles affreuses pensées m’obsèdent ! … C’est le raisonnement des pires matérialistes qui s’impose à mon esprit. … Je les subis forcément, … mais tout en les subissant je ne cesse de faire des actes de foi. »[8] « Le démon est autour de moi, je ne le vois pas, mais je le sens… il me tourmente, il me tient comme avec une main de fer pour m’empêcher de prendre le plus petit soulagement, il augmente mes maux afin que je me désespère… Et je ne puis pas prier ! »[9]

Au printemps de 1897, la santé de Thérèse se dégrade rapidement. Le 20 juillet, le poumon droit est ravagé, avec plusieurs cavités. Le 17 août, la tuberculose est à son stade le plus avancé, le second poumon est atteint, les intestins sont gangrénés.[10] Thérèse ne respire plus qu’avec un demi-poumon. Elle souffre la soif, la fièvre, les sueurs profuses. Ses souffrances sont alors extrêmes. « Je vous assure, dit-elle, qu’il ne faut qu’un moment lorsqu’on souffre à ce point pour perdre la raison. Et alors on s’empoisonnerait très bien. »[11] À partir du 29 septembre 1897, l’ultime agonie commence. « Je meurs martyre d’amour », dit-elle à Sr Geneviève.[12] Elle passe une nuit difficile, veillée par ses sœurs. Au matin, elle leur dit : « C'est l'agonie toute pure, sans aucun mélange de consolation. »[13] La respiration est de plus en plus courte, elle étouffe, épuisée par la douleur : « Jamais je n'aurais cru qu'il était possible de tant souffrir ! Jamais ! Jamais ! Je ne puis m'expliquer cela que par le désir ardent que j'ai eu de sauver des âmes. », affirme-t-elle.[14] Vers sept heures du soir, elle prononce ses dernières paroles « Oh ! je l'aime ! Mon Dieu… Je vous aime… ». Elle s'affaisse, puis rouvre une dernière fois les yeux. Elle a alors une extase qui dure l'espace d'un credo, avant de rendre le dernier soupir. Elle meurt le 30 septembre 1897 à 19 h 20, à l'âge de vingt-quatre ans. « Je ne meurs pas, j'entre dans la vie », écrivait-elle dans l'une de ses dernières lettres.

En définitive, pour Sainte Thérèse, il n’est nul doute : à travers les souffrances corporelles, morales et spirituelles qu’elle a endurées, Dieu a exaucé son désir d’être une martyre. Et vous, qu’en pensez-vous : celle qui, sans sortir du cloître, a mérité d’être déclarée sainte Patronne des missions pourra-t-elle aussi un jour être déclarée sainte Patronne des martyrs ?

 

 

 


[1] Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face, Œuvres Complètes, les Editions du Cerf – Desclée de Brouwer 1992, 1163.

[2] Ibid., 225.

[3] Ibid., 957.

[4] Ibid., 964.

[5] Ibid., 225.

[6] Ibid., 132, 1256.

[7] Ibid., 241-243.

[8] Ibid., 1468.

[9] Ibid., 1158.

[10] Ibid., 984.

[11] Ibid., 1178.

[12] Ibid., 1181.

[13] Ibid., 1142.

[14] Ibid., 1144.

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